L'édito d'octobre 2022

avril 2024

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Je suis tombé par hasard sur la vidéo d’une interview de Marguerite Duras où elle dit de l’homme de l’an 2000 qu’il sera littéralement noyé dans l’information. Elle ajoute, qu’il n’y aura plus personne pour lire, que les postes de télévision seront partout, elle s'interroge : où est-on lorsqu’on regarde la télévision ? Elle dit : les hommes ne seront plus jamais seuls comme on est seul lorsqu’on lit. Elle parle de cauchemar. 


Lors de notre dernière soirée lecture, nous n’étions que quatre. Le décor habituel était posé, la petite table de bois, la lampe de chevet, les chaises. Ambiance tamisée. Quatre, c’est peu. Il y avait les fidèles Catherine, Irina, Joël et moi. Nous avons un peu discuté, si les vacances avaient été bonnes, de la difficulté de trouver des textes sur le thème de la piscine, et sans que je me souvienne pourquoi, des smartphones. Les éventuels retardataires ne sont jamais arrivée·s, nous avons commencé la séance. Les uns après les autres, nous nous sommes assis à la table et nous avons lu et nous avons écouté très attentivement nos voix, les mots des auteurs choisis, les pages qui se tournent, les petites hésitations de chacun. Pas de chlore, de liner turquoise, ni d’ennui immobile dans nos voix, mais plutôt du sable, de l’eau salée et des voyages.                      


Le moment était doux et calme, entre deux mots dits, se niche toujours un bruit de fond, celui de la rue Chassagnolle quand la porte reste ouverte, celui de la cour avec nos voisins du Star Hôtel.  

Après une grosse demi-heure de lecture partagée, nous avons silencieusement éteint les lumières, rangé les chaises, refermé Un Lieu Pour Respirer et nous sommes rentrés chez nous.


Duras dit encore que ceux qui se tireront du cauchemar seront peut-être les héros de l’avenir. 

Je ne sais pas si, ce soir-là, nous avons été des héros, mais le cauchemar a certainement été pour chacun d'entre nous un peu moins prégnant.


Jérome.

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